Les plus belles pensées d'adieux sont celles qui se contentent du
silence.
Je suis allée au cimetière. Je suis passée par le cimetière. J'y ai seulement croisé le gardien, celui qui vous regarde rapidement et vous donne l'impression de ne pas être au bon endroit. Pas encore au bon endroit. C'est vrai que ça peut paraître étrange de n'avoir personne à visiter, de simplement se promener entre les tombes et de compter le nombre de morts pour l'année de votre naissance. Les quelques pauvres épitaphes impersonnelles tintées de sous-entendus spirituelles achetées aux pompes funèbres. Celles de quelques mots jetés par désarroi ou parce que les mots manquaient justement. Et plutôt que se taire, on y lit des " A notre cher frère regretté " " A
nos grands parents bien aimés" " Regrets". Que des regrets. Ces
regrets qui font renaitre les morts seulement sous forme de démons ou d'âpres mélancolies. Qu'est ce qu'on regrette d'une vie ? De ne pas avoir
profité de la personne ? de l'avoir par moment blessé ? sa simple
présence ? Le tout ? Le regret qui vient de cette envie à ne vouloir retenir que le
meilleur du pire. Le regret, le vrai, c'est celui qui nous fait
regretter un humain, dans toute sa beauté et son absurdité. C'est drôle
comme on ressent encore les différences sociales. Des caveaux splendides
aux minables trous dans le sol délimités par une chaîne qui s'affaisse. Les
tombeaux saccagés, victimes de casseurs ivres ou simplement de la
colère d'un proche. Blasphémer encore une dernière fois pour être
quitte. Des étages et des étages de cadavres qui se font face ou qui se
côtoient. Tous obligés de se supporter sans avoir à broncher désormais. Les
gens vous regardent avec compassion, pensant que vous visité un proche
pour vous recueillir. Être regardé de travers parce que sa tenue n'est
pas assez accablante pour un deuil. Comme si porter le deuil sur son
visage n'était pas suffisant. J'ai visité mes futurs 5m carré de
longueur et les profondeurs infinies du vide.
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